La question des travaux en bail commercial (article 606 du Code civil)

26 novembre 2020 | Formation Immobilier

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La question des travaux en bail commercial a souvent été source de litiges. Qui du bailleur ou du locataire prend en charge les travaux ? Qu’en est-il des gros travaux ? Comment interpréter l’Article 606 du Code civil ? Lors de la rédaction du contrat de bail commercial, il est important pour un agent immobilier ou professionnel de l’immobilier de connaître les différentes implications concernant ce sujet. Nous répondons à toutes ces questions dans cet article !

Bail commercial

Revenons tout d’abord à la définition du bail commercial. Il s’agit d’un contrat de location pour un local servant à l’exercice d’une activité commerciale, industrielle ou artisanale. Le local doit servir pour l’exploitation d’un fonds de commerce.

Le contrat de bail commercial

Le contrat ne doit pas respecter une quelconque forme particulière, cependant il doit contenir un certain nombre d’informations obligatoires. Conclure un contrat par écrit est une sécurité pour le bailleur comme pour le locataire.

Il doit notamment indiquer la répartition des charges, impôts, taxes et redevances entre le locataire et le bailleur. Entre autres, doivent être inclus un inventaire précis et limitatif et la répartition entre les charges et les dépenses entre le locataire et le bailleur.

S’il y a plusieurs locataires dans un même immeuble, il doit également être précisé dans le contrat comment se répartissent les charges et les coûts de travaux entre les locataires (en fonction de la surface exploitée ou le coût des travaux).

Un agent immobilier, porteur de la carte professionnelle et formé à la formation loi Alur, est celui qui est en charge de la location d’un bien, que ce soit un local à usage commercial ou non. Il est parfois amené à rédiger des contrats. Alors quel problème se présente dans le cas présent ?

Ce type de contrat (bail commercial) est sujet à de nombreux litiges concernant la répartition des charges entre bailleur et locataire portant sur les réparations et les gros travaux. Le bailleur a tendance à vouloir se décharger des charges qui lui incombent notamment en matière de gros travaux (Article 606 du Code civil).

Il s’agit donc d’être vigilant, en tant que locataire et agent immobilier, lors de la rédaction du contrat de bail commercial. Les clauses spécifiques rédigées peuvent vouloir déroger aux règles de répartition des travaux.

Quels travaux sont à la charge du bailleur ? Et quels travaux sont à la charge du locataire ?

Travaux à la charge du propriétaire

Nous nous référons à l’Article 605 du Code civil qui est le premier texte sur lequel s’appuyer pour la réalisation de travaux en location :

« L’usufruitier n’est tenu qu’aux réparations d’entretien.

Les grosses réparations demeurent à la charge du propriétaire, à moins qu’elles n’aient été occasionnées par le défaut de réparations d’entretien, depuis l’ouverture de l’usufruit ; auquel cas l’usufruitier en est aussi tenu. »

Les dépenses qui concernent l’entretien du local commercial et les réparations courantes sont donc à la charge du locataire, tandis que les grosses réparations (gros travaux) sont à la charge du propriétaire.

 

Les charges concernant les travaux qui incombent au propriétaire, et qui ne peuvent donc pas être imputées au locataire, sont les suivantes :

  • Dépenses relatives aux grosses réparations touchant au bâtiment, tels que les murs de soutènement et de clôture, voûtes, digues, charpente et toiture
  • Honoraires liés à la réalisation des travaux relatifs aux grosses réparations touchant au bâtiment
  • Dépenses relatives aux travaux liés à la vétusté ou de mise aux normes lorsqu’il s’agit de grosses réparations
  • Charges, impôts, taxes, redevances et coût des travaux portant sur des locaux vacants ou imputables à d’autres locataires dans un ensemble immobilier

Travaux à la charge du locataire

Les dépenses locatives, c’est-à-dire les dépenses d’entretien et de réparations courantes, incombent au locataire.

 

Les charges, liées à l’occupation des locaux, qui sont à la charge du locataire sont les suivantes :

  • Dépenses courantes d’eau, de gaz et d’électricité
  • Dépenses d’entretien et de réparations courantes telles que les peintures, papiers peints, moquettes, appareils de chauffage, compteurs, sanitaires, volets extérieurs
  • Dépenses d’équipement de la copropriété telles que la quote-part des frais d’ascenseurs ou des charges du personnel d’entretien
  • Travaux d’embellissement dont le montant excède le coût du remplacement à l’identique
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Gros travaux, grosses réparations : définition

Que sont exactement les gros travaux, les grosses réparations dont parle l’Article 605 du Code civil et qui sont à la charge du bailleur ?

Voici les précisions apportées par l’Article 606 du Code civil :

« Les grosses réparations sont celles des gros murs et des voûtes, le rétablissement des poutres et des couvertures entières. Celui des digues et des murs de soutènement et de clôture aussi en entier. Toutes les autres réparations sont d’entretien. »

Au cours des années, certains bailleurs ont essayé de contourner la prise en charge de travaux en profitant de la nature floue des termes employés dans l’article cité précédemment. Ils inscrivaient des clauses spécifiques dans le contrat du bail commercial mettant de gros travaux à la charge du locataire.

Les juges ont, chacun dans son cas, tranché et produit des interprétations jurisprudentielles concernant la nature des « grosses réparations ». Ils se sont notamment appuyés sur l’Article R111-26 du Code de la construction et de l’habitation stipulant :

« Les gros ouvrages sont :

1. a) Les éléments porteurs concourant à la stabilité ou à la solidité du bâtiment et tous autres éléments qui leur sont intégrés ou forment corps avec eux ;

2. b) Les éléments qui assurent le clos, le couvert et l’étanchéité à l’exclusion de leurs parties mobiles.

Ces éléments comprennent notamment :

– les revêtements des murs à l’exclusion de la peinture et des papiers peints ;

– les escaliers et planchers ainsi que leur revêtement en matériau dur ;

– les plafonds et les cloisons fixes ;

– les portions de canalisations, tuyauteries, conduites et gaines de toute sorte logées à l’intérieur des murs, plafonds ou planchers, ou prises dans la masse du revêtement, à l’exclusion de celles qui sont seulement scellées ;

– les charpentes fixes des ascenseurs et monte-charge ;

– les bâtis et huisseries des portes, fenêtres et verrières. »

Les changements depuis la loi Pinel de 2014

La loi Pinel de 2014 est venue préciser les différentes charges concernant les travaux :

Article L145-40-2 du Code de commerce (créé par la loi Pinel, loi n° 2014-626 du 18 juin 2014) :

« Dans un ensemble immobilier comportant plusieurs locataires, le contrat de location précise la répartition des charges ou du coût des travaux entre les différents locataires occupant cet ensemble. Cette répartition est fonction de la surface exploitée. Le montant des impôts, taxes et redevances pouvant être imputés au locataire correspond strictement au local occupé par chaque locataire et à la quote-part des parties communes nécessaires à l’exploitation de la chose louée. En cours de bail, le bailleur est tenu d’informer les locataires de tout élément susceptible de modifier la répartition des charges entre locataires.

Un décret en Conseil d’Etat fixe les modalités d’application du présent article. Il précise les charges, les impôts, taxes et redevances qui, en raison de leur nature, ne peuvent être imputés au locataire et les modalités d’information des preneurs. »

Le décret n° 2014-1317 du 3 novembre 2014 relatif au bail commercial vient préciser les charges qui ne peuvent pas être imputées au locataire et qui doivent être supportées par le bailleur :

Article R145-35 du Code du commerce créé par le décret n° 2014-1317 du 3 novembre 2014 relatif au bail commercial

« Ne peuvent être imputés au locataire :

1° Les dépenses relatives aux grosses réparations mentionnées à l’article 606 du code civil ainsi que, le cas échéant, les honoraires liés à la réalisation de ces travaux ;

2° Les dépenses relatives aux travaux ayant pour objet de remédier à la vétusté ou de mettre en conformité avec la réglementation le bien loué ou l’immeuble dans lequel il se trouve, dès lors qu’ils relèvent des grosses réparations mentionnées à l’alinéa précédent ;

[…]

5° Dans un ensemble immobilier, les charges, impôts, taxes, redevances et le coût des travaux relatifs à des locaux vacants ou imputables à d’autres locataires.

La répartition entre les locataires des charges, des impôts, taxes et redevances et du coût des travaux relatifs à l’ensemble immobilier peut être conventionnellement pondérée. Ces pondérations sont portées à la connaissance des locataires.

Ne sont pas comprises dans les dépenses mentionnées aux 1° et 2° celles se rapportant à des travaux d’embellissement dont le montant excède le coût du remplacement à l’identique. »

Conclusion : la question des travaux en bail commercial

Les articles 605 et 606 du Code civil sont les textes de base concernant la réalisation de gros travaux en bail commercial. Ils sont complétés par les différents textes cités précédemment et qui empêchent tout abus de la part des bailleurs lorsqu’est conclu un bail commercial avec un locataire.

Il est tout de même important de rappeler qu’un locataire devra payer les travaux lorsque :

  • il manque à son obligation d’entretien du local : si de grosses réparations sont nécessaires à cause du manque d’entretien, le locataire aura les travaux à sa charge
  • il entreprendra de gros travaux de son propre chef, sans demander en amont au propriétaire de réaliser ces travaux : le locataire devra payer les travaux qu’il aura entrepris de lui-même

Précisions supplémentaires

L’entretien des locaux commerciaux est une obligation pour le propriétaire comme pour le locataire, obligation régie par les dispositions du Code civil et non par le statut des baux commerciaux.

Le bailleur est obligé, par la nature du contrat et sans qu’il soit besoin d’aucune stipulation particulière, d’entretenir le bien en état de servir à l’usage pour lequel il a été loué. Il doit délivrer le bien en bon état de réparations et faire toutes les réparations (autres que locatives) pendant la durée du bail. Réparations qui peuvent devenir nécessaires dans les lieux loués (Articles 1719 et 1720 du Code civil).

De son côté, sauf clause contraire, le locataire a à sa charge les réparations locatives ou de menu entretien (Code civil article 1754), sauf si elles sont occasionnées par la vétusté ou la force majeure (Article 1755).

Il est important de noter qu’est valable la clause d’un bail :

  • par laquelle le locataire s’est engagé à prendre les lieux dans l’état où ils se trouvent sans pouvoir demander aucune réparation de quelque nature que ce soit pendant la durée du bail (Cass. com. 9-4-1964)
  • qui comporte l’obligation pour le locataire, « à l’exclusion des gros travaux à faire aux murs, du rétablissement des poutres et des réfections entières de couvertures, d’effectuer toutes les réparations locatives et d’entretien et tous autres travaux nécessaires au même titre que s’il était propriétaire de l’immeuble loué » (Cass. soc. 14-1-1955 n° 1391)
  • qui stipule qu’aucune espèce de réparation ne sera à la charge du bailleur pendant la durée du bail (Cass. 3e civ. 7-2-1978 n° 76-14.214).

De même, l’Article 1754 prévoit expressément que les parties peuvent déroger à la règle selon laquelle les réparations locatives sont à la charge du locataire.

En ce qui concerne les réparations nécessaires

Le bailleur doit effectuer toutes les réparations (autres que locatives) nécessaires pour maintenir l’immeuble en l’état de servir à l’usage pour lequel il a été loué, même si elles résultent de la vétusté ou d’un cas de force majeure.

Que sont les réparations nécessaires ? Il s’agit de toutes les réparations indispensables pour que l’immeuble loué et ses dépendances soient exploitables conformément à la destination en vue de laquelle ils ont été loués.

Il faut apporter le plus grand soin à la rédaction des clauses qui transfèrent sur le locataire les obligations incombant normalement au propriétaire. Cela afin de respecter les limites à la liberté contractuelle posées par la loi, en ne se contentant pas de clauses types mais en adaptant leur contenu aux caractéristiques et contraintes de l’immeuble loué et à l’usage auquel il est destiné.

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