Un usufruitier peut-il signer un bail ?

Usufruitier signer bail - Formation loi Alur

Cet article répond à la question de savoir si un usufruitier peut signer un bail sans l’intervention du nu-propriétaire. Les réponses apportées entrent dans le cadre des formations loi Alur pour les professionnels de l’immobilier.

Un exemple concret

Pour comprendre la question posée dans cet article, voici un exemple concret de façon à mieux interpréter :

M. Jean K a un enfant issu d’un premier mariage, M. Romain K, enfant unique. M. Jean K épouse ensuite en secondes noces Mme Marie K, ils n’ont pas eu d’enfants de cette union. M. Jean K a acheté deux biens immobiliers, une maison qu’il occupait avec Mme Marie K et un appartement qu’il louait sans mandat de gestion. Au décès de M. Jean K, par testament, celui-ci laisse la maison à Mme Marie K et les loyers de l’appartement, c’est-à-dire l’usufruit, à Mme Marie K, cependant il laisse la nue-propriété de l’appartement à son fils M. Romain K.

Dans ce cas, est-il possible pour Mme Marie K de signer un bail, ici un mandat de gestion, pour l’appartement, sans l’accord du nu-propriétaire M. Romain K ?

Comment s’organisent les droits sur un bien ?

Tout d’abord, il est important de considérer le statut d’un bien. Un propriétaire (en pleine propriété) possède 3 prérogatives sur son bien (USUS / ABUSUS / FRUCTUS).

À la suite d’un décès, d’une donation ou d’un jugement de divorce, il arrive qu’un bien soit démembré. Le démembrement de propriété désigne la répartition des attributs du droit de propriété entre usufruitier(s) et nu(s)-propriétaire(s).

Le tableau ci-dessous résume la répartition des droits :

Droits sur le bienPleine propriétéNue-propriétéUsufruit
ABUSUS : Disposer du bien (le vendre par exemple)OuiOuiNon
USUS : Utiliser un bien (l’occuper par exemple)OuiNonOui
FRUCTUS : Percevoir des revenus issus d’un bien (percevoir des loyers par exemple)OuiNonOui

Qu’est-ce qu’un usufruitier et un nu-propriétaire ?

L’usufruit représente le droit d’utiliser un bien et d’en percevoir les revenus, sans toutefois en être le propriétaire. La propriété revient au nu-propriétaire.

C’est le droit de propriété qui est divisé entre la nue-propriété (pour le propriétaire) et l’usufruit (pour l’usufruitier). Ce dernier possède des droits et obligations qu’il doit respecter : notamment, il doit veiller à la bonne conservation du bien pour le rendre en bon état au nu-propriétaire à la fin de l’usufruit. Le droit à l’usufruit est temporaire (pendant une durée fixée) ou viager (pendant la vie de l’usufruitier).

Il est possible de bénéficier d’un usufruit par contrat (vente ou donation d’un droit d’usufruit) ou par testament. Voici deux cas dans lesquels un individu peut être usufruitier :

-un parent est usufruitier sur les biens de ses enfants âgés de moins de 16 ans, qui eux sont les nus-propriétaires des biens en question.

-un veuf ou une veuve qui reçoit en usufruit le patrimoine de l’époux ou de l’épouse décédé(e), ce sont les enfants du défunt qui deviennent les nus-propriétaires des biens en question.

L’usufruitier possède 2 droits (sauf s’il y a existence d’un accord entre l’usufruitier et le nu-propriétaire) :

-le droit d’utiliser le bien : utiliser le bien pour lui-même ou le louer sans l’accord du propriétaire. Il est important de noter que pour les biens faisant partie des catégories de baux ruraux, commerciaux, artisanaux ou industriels, il est nécessaire d’avoir l’accord du propriétaire.

-le droit de percevoir les revenus issus du bien : loyers, intérêts d’une somme d’argent, récoltes, et cela pendant toute la durée de l’usufruit.

Quelles sont les obligations de l’usufruitier et à quel moment prend fin l’usufruit ?

L’usufruitier possède plusieurs obligations qui sont les suivantes :

-Veiller à la bonne conservation du bien

-Faire procéder à un inventaire (pour un bien mobilier)

-Faire constater l’état du bien (pour un bien immobilier)

-Payer la taxe foncière et la taxe d’habitation (pour un bien immobilier)

-S’engager à jouir raisonnablement du bien en fournissant un document signé au nu-propriétaire (sauf si ce dernier l’en dispense)

-Faire toutes les réparations d’entretien. Les grosses réparations sont à la charge du nu-propriétaire sauf si elles résultent du défaut d’entretien de la part de l’usufruitier (pour un bien immobilier, les grosses réparations ne concernent que le gros-œuvre).

 

La fin de l’usufruit peut survenir de différentes manières :

-Mort de l’usufruitier (sauf en cas de donation de son vivant ou de transmission par testament)

-Expiration du délai d’usufruit fixé

-Non-usage pendant 30 ans

-Renonciation à l’usufruit

-Perte totale de la chose du bien

-Lorsque le titulaire de l’usufruit et de la nue-propriété devient une même personne

-Abus de jouissance de l’usufruitier (dégradation du bien ou défaut d’entretien)

-Lorsque l’enfant titulaire de la nue-propriété d’un bien atteint 16 ans (l’usufruit légal des parents sur ce bien prend alors fin)

Un usufruitier peut-il donc signer un bail ?

L’usufruitier peut conclure seul un bail sauf lorsqu’il s’agit d’un bail rural ou d’un bail commercial ; le concours du nu-propriétaire est alors nécessaire. D’ailleurs à défaut d’accord du nu-propriétaire, l’usufruitier peut être autorisé par le juge à conclure seul (C. civ. art. 595, al. 4).

L’usufruitier peut également conclure seul des baux de courte durée consentis en application de l’article L 145-5 du Code de commerce qui échappent au statut des baux commerciaux (Cass. 3e civ. 5-4-1995 : RJDA 6/95 n° 687). En effet, l’obligation pour l’usufruitier d’obtenir le consentement du nu-propriétaire en matière de baux commerciaux vaut également pour le renouvellement (Cass. 3e civ. 24-3-1999 n° 97-16.856 :  RJDA 5/99 n° 525). En revanche, l’usufruitier a le pouvoir de donner, seul, congé au locataire (Cass. 3e civ. 29-1-1974 : Bull. civ. III n° 48) ou de poursuivre seul la résiliation du bail (Cass. 3e civ. 4-5-1976 : Bull. civ. III n° 186). Il a également le pouvoir de refuser seul la demande de renouvellement du bail formée par le locataire (Cass. 3e civ. 9-12-2009 n° 08-20.512).

En raison du caractère temporaire de l’usufruit, les dispositions suivantes ont été prévues dans l’intérêt du nu-propriétaire (C. civ. art. 595, al. 2 et 3) :

  • tous les baux que l’usufruitier a consentis seul pour une durée supérieure à neuf ans ne sont obligatoires à l’égard du nu-propriétaire que pour la durée restant à courir à compter de la cessation de l’usufruit, de telle sorte que le locataire n’ait que le droit d’achever une période de neuf ans ;
  • -pour les baux d’une durée inférieure ou égale à neuf ans, l’opposabilité de la durée résiduelle du bail en cours est subordonnée à un début d’exécution avant la cessation de l’usufruit dès lors que le bail a été conclu ou renouvelé plus de trois ans avant l’expiration de l’usufruit s’il s’agit d’un bail rural et plus de deux ans avant cette même date s’il s’agit d’un bail d’habitation.

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